Née en 1963 d'un père chypriote turc et d'une mère anglaise, l'artiste britannique grandit à Margate avec son frère jumeau, Paul. Elle étudie au Medway College of Design de 1980 à 1982, où elle rencontre Billy Childish, avec lequel elle forme un couple jusqu'en 1987, et se voit associée aux Medway Poets. Elle finit par obtenir un MA en peinture au Royal College of Art.
L'oeuvre de Tracey Emin est marquée par la destruction. Elle subit peu de temps après son MA deux avortements qui la traumatisent. L'artiste entreprend alors de détruire la plupart des peintures qu'elle avait réalisées jusque-là. Elle donne à cette période le nom de "suicide émotionnel". La première de ses expositions, My Major Retrospective, qui a lieu en 1994 à la WhiteCube Gallery à Londres, rassemble des photographies de ses œuvres détruites et de moments personnels.
Everyone I have ever slept with est une œuvre ambigüe et souvent mal comprise. Elle se compose d'une toile de tente sur laquelle sont brodés des noms. L'ambivalence du verbe "to sleep", qui peut à la fois désigner le sommeil et la relation sexuelle, a entraîné une incompréhension majeure. Cependant, la présence de noms de membres de sa famille et de ceux de ses deux fœtus avortés en plus de ceux de ses amants donnent à l’œuvre une dimension intime qui englobe de multiples types de relations. Réalisée en 1997, elle fut achetée par le collectionneur Charles Saatchi, exposée à la Royal Academy de Londres mais disparait dans l'incendie de l'entrepôt Saatchi en 2004. Le tissu est un des matériaux de prédilection de Tracey Emin, qui utilise des vêtements ou des draps ayant appartenu à sa famille, sur lesquels elle rajoute des mots qui ont une résonance particulière dans sa vie, comme ses premiers, "look apple".
Controversée, déroutante dérangeante, My Bed est, à l'image de la plupart des œuvres de Tracey Emin, profondément intime. Il s'agit du propre lit de l'artiste, dans lequel elle a passé plusieurs jours à penser au suicide à cause de problèmes de couple. Les différents objets qui parsèment le lit et ses alentours immédiats évoquent des dizaines d'instants désormais emmêlés comme les draps défaits : des mégots de cigarette, des miettes de nourriture, des traces de sang menstruel, des bouteilles de vodka, des préservatifs usagés, un test de grossesse et d'autres objets disparates.
Les créations de Tracey Emin sont très liées aux mots et à son intimité : "I'm looking at me in the most intimate ways". Ses œuvres comportent souvent des ratures, marqueurs de leur authenticité. Elle illustre à merveille les mots de Clémenceau : "Une vie est une œuvre d'art".
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