En septembre, nous avions évoqué Louis Janmot au travers d’un article ainsi que d’une vidéo réalisée au sein de l’exposition consacrée au peintre et son Poème de l’âme au musée d’Orsay. Jusqu'au 1er décembre, la Galerie Michel Descours, bien connue pour son goût pour les artistes lyonnais, consacre elle aussi une exposition à Janmot. Si nous y retrouvons des compositions attendues pour le peintre, comme des dessins pour le Poème de l’âme ou encore une très belle étude pour la fresque de l’Antiquaille à Lyon, nous découvrons également un aspect moins connu de sa production : le paysage. Pourtant, un simple coup d’œil au Poème de l’âme suffit pour percevoir toute l’importance du paysage dans la manière de Louis Janmot. Travaillé avec soin, parfois inspiré de vrais lieux comme les environs de Rome, le paysage est un personnage en soi dans le récit qu’y déroule l’artiste. Il est également l’ami de peintres de paysages reconnus : Paul Flandrin bien sûr, et le moins connu Florentin Servan. Les trois amis se retrouvent très régulièrement à Lacoux, dans le Bugey. Janmot fréquente également Joseph Trévoux, habitué de l'atelier d'Auguste Ravier dans les alentours de Morestel.
La Galerie Descours présente une sélection très intéressante et variée de paysages d’un Janmot polymorphe, à la touche et aux techniques très variables. Beaucoup ont été réalisés dans le sud de la France, entre Toulon et Hyères, au cours des nombreux séjours de l’artiste. Le plus significatif (et le plus important), très proche par sa touche du Poème de l’âme, est une vue non datée du village de La Garde et du Coudon près de Toulon. Janmot y adopte une approche réaliste dans la retranscription topographique des lieux, mais la palette de verts et roses utilisée évoque de manière très claire le Poème. S’ajoutent à cela les effets d’ombres et de lumières intenses obtenus par des coups de brosses rapides et visibles avec de forts empâtements, participant du mysticisme de l’ensemble. Dans ce même registre, une très belle vue au pastel de côte en Bretagne rappelle, une fois encore, par sa lumière et son immensité, les travaux réalisés pour le Poème de l’âme.
A l’inverse, un paysage saisi à Hyères tranche totalement. Déjà montré par la galerie en 2022, ce paysage synthétique au pastel aux lignes épurées est le témoin d’une production plus intimiste de Janmot, moins achevée et sans doute plutôt privée. Si les tons très vifs de la composition contrastent avec le tableau précédent et le reste de sa production, ils témoignent toujours de l’importance capitale du travail de la couleur dans l’Œuvre du lyonnais. Cette feuille n’est pas sans rappeler certaines compositions aquarellées des frères Flandrin, notamment Paul, en Italie à la fin des années 1830 puis en Normandie, cette fois-ci au pastel, entre 1840 et 1860. De beaux exemples ont été présentés en 2021 au musée des Beaux-Arts de Lyon.
Un autre tableau important présenté par la galerie est daté de 1885 et localisé à Toulon. Peint dans les dernières années de la vie du peintre, cette vue du « chemin des amoureux » accuse ces mêmes jeux sur les verts, roses et marrons. Mais loin de l’empâtement de la vue de La Garde, la touche est plus sage et tout semble plus ordonné le long de ce chemin bordant le ruisseau. Là est tout l’intérêt de ce genre de présentations, qui témoigne de l’évolution artistique d’un peintre, ou du moins des aspects multiples de sa production pour ne pas le réduire à une manière et, comme ce fut souvent le cas pour Janmot, à une réalisation comme le Poème de l’âme. Louis Janmot a certes été très marqué par l’enseignement de Ingres mais on ne peut le réduire au dessin et à une touche lisse, comme ce fut fait à de multiples reprises pour l'école lyonnaise. La couleur, tout autant que la ligne, se fait porteuse de sens et confère bien souvent sa signification à l’ensemble. Le paysage peut constituer une finalité en soi chez Janmot, sans être nécessairement rattaché à un support textuel.
Terminons avec un dessin montrant bien que Janmot va puiser ses inspirations chez les autres artistes sans pour autant s'y s’enfermer, comme par exemple lorsqu’il se rend à Bruges et se retrouve confronté aux œuvres des primitifs flamands, ici van Eyck.
Galerie Michel Descours
10 rue de Louvois
75002, Paris
+33 1 87 44 71 01
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