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Dans les coulisses du Château : une visite à la Maison Élysée


Lieu de pouvoir fascinant, à l’image de la Maison Blanche aux États-Unis ou du 10, Downing Street au Royaume-Uni, le Palais de l’Élysée accueille chaque année de plus en plus de visiteurs lors des désormais traditionnelles Journées européennes du patrimoine, au mois de septembre. Ne pouvant être ouvert au public le reste de l’année, l’hôtel d’Évreux, comme il se nommait autrefois, reste donc aussi mystérieux qu’attrayant aux yeux du grand public. Pour tenter d’entrouvrir de manière permanente les portes du Château aux Français et aux visiteurs étrangers, le Président de la République a souhaité l’ouverture d’un petit espace d’exposition, rue du Faubourg Saint-Honoré, face à sa célèbre résidence. L’objectif de la Maison Élysée est clair : faire découvrir l’histoire et le patrimoine de ce palais du siècle des Lumières, construit en 1722 pour devenir un instrument de soft power à la française.


Autant le souligner d’entrée, il ne faut pas s’attendre à une expérience de visite supérieure à une demi-heure, les lieux étant, nous l’avons dit, relativement modestes. Pour autant, le discours développé dans les différents espaces va droit au but. Y avait-il besoin d’en faire plus ? Rien n’est moins sûr. Une première salle introduit d’abord un exposé général sur le rôle du Président de la République et son statut de représentant de la France à l’international. La gastronomie et les arts de la table y sont aussi mis en avant avec, il faut le dire, une magnifique vitrine, illustrant cette arme diplomatique si efficace dont nous disposons depuis Talleyrand.



La visite se poursuivant, un nouvel espace présente le quotidien de la Présidence et de ses services qui font vivre l’institution depuis 1848. Les cuisines, la sécurité, les huissiers, tout le monde est représenté. À noter aussi l’omniprésence, très jupitérienne, de l’actuel locataire des lieux sur de nombreuses images, laissant presque croire qu’aucun autre personnage important n’a vécu à l’Élysée auparavant…


Reconstitution du salon doré de l'Élysée, bureau du Président de la République, avec le bureau de style Louis XV par Charles Cressent (1685-1768)

Le palais étant aussi un lieu d’histoire, puisqu’il a connu l’abdication d’un empereur en 1815, le coup d’État d’un autre le 2 décembre 1851 ou encore les réceptions fastueuses de la IIIe République, il fallait bien présenter quelques symboles du lieu. Le clou de la visite est donc l’exposition du célèbre bureau plat, exécuté par Charles Cressent sur lequel fut signée, notamment, la Constitution de 1958 par Charles De Gaulle.


Deux autres salles permettent de découvrir l’aménagement et la décoration intérieure du Palais au fil du temps. Un coup de projecteur est donc donné sur les diverses commandes présidentielles de la Ve République avec une rapide présentation des fameux salons voulus par Georges Pompidou et dessinés par Pierre Paulin en 1971. Les réaménagements des différents salons et du Jardin d’hiver sont aussi mis à l’honneur avec l’installation en 2021 d’une verrière tricolore baptisée Pavoisé, signée par l’artiste Daniel Buren et le designer Ora-Ïto. L’essentiel du propos est illustré par des photographies, certes très esthétiques, mais qui nous laissent un peu sur notre faim. On aimerait en voir davantage, mais pour cela, il faudrait pouvoir entrer au Palais…



En conclusion de cette partie, un espace vidéo immersif très bien réalisé, pourvu d’un grand écran panoramique, propose de retracer les évolutions architecturales de l’hôtel particulier depuis sa création jusqu’à nos jours, à l’aide d’images de synthèse d’une grande qualité. L’ensemble est commenté en voix off, alternativement en français – avec la voix de Stéphane Bern – et en anglais. La vidéo ne dure pas plus de cinq minutes mais elle offre un contenu complet et efficace.


Reconstitution numérique de la façade du Palais de l'Élysée sous la IIIe République (1870-1940)

L’ultime étape de la visite est le passage par le cabinet de curiosité où sont présentés les différents cadeaux officiels remis au chef de l’État par des pays étrangers ou que le Président remet en retour aux invités de la République. Année olympique oblige, l’accent est mis sur cette thématique avec une torche des JO de 2008 offerte par le président chinois à sa dernière visite ou une médaille franco-américaine commémorative des Jeux de Paris 2024 et de Los Angeles 2028, remise par le président américain Joe Biden. Bien d’autres objets y sont à découvrir, et nous nous plaisons à penser que les collections de cet espace seront renouvelées régulièrement.



Avant de sortir, la Maison Élysée impose l’incontournable passage par la boutique, véritable vitrine du savoir-faire français. Les prix de certains produits peuvent paraître prohibitifs mais il faut reconnaitre que l’accent est mis sur la qualité des articles, tous fabriqués en France. Des parapluies faits main à Cherbourg à la tasse en porcelaine de Limoges en passant par l’huile d’olive de Provence, il y en a pour tous les goûts. À noter que l’ensemble des recettes est consacré à alimenter le budget d’entretien et de restauration des espaces de l’Élysée. Si le cœur en dit au visiteur, il est aussi possible de déguster quelques pâtisseries, dont les prix varient entre 9 et 12 euros, confectionnées en partenariat avec le chef Alain Ducasse au salon de thé, aménagé en mezzanine. Celles-ci semblent déjà être victimes de leur succès, la rupture de stock pointant déjà le bout de son nez en plein samedi après-midi.


L’effort d’ouverture souhaité par l’Élysée avec l’inauguration de ce lieu est louable et la Maison Élysée remplira sans aucun doute pleinement son rôle de soft power dans les années à venir. Pour autant, les moyens employés, visiblement importants, ont mis l’accent sur de nombreux dispositifs numériques, très à la mode et efficaces pour rationaliser la médiation dans un espace réduit. Gageons simplement que l’entretien de ce matériel sera à la hauteur des ambitions du lieux. Trop nombreux ont été, depuis les années 1990, les espaces numériques laissés à l’abandon au bout de quelques années, laissant au public une impression décevante de leur expérience de visite. Nous n’en sommes toutefois pas encore là, laissons pour le moment sa chance à cet établissement qui suscite déjà un certain intérêt, l’entrée étant libre et gratuite jusqu’à la fin du mois, avant la mise en place de créneaux de réservation.

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